Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
25 janvier 2013 5 25 /01 /janvier /2013 19:08

Cela faisait maintenant plus d'un mois que je n'avais pas écrit un article sur ce blog. Lors de ma dernière publication, je pensais, et avais annoncé, reprendre un rythme d'écriture plus régulier mais ce ne fut visiblement pas le cas. Pas de panne d'inspiration cette fois-ci tant les sujets d'actualité pullulent ces dernières semaines mais plutôt un manque cruel de temps. De fait, mon nouveau travail et mon nouveau logement accaparent une grande partie de mes journées, ne me laissant que peu de répit pour écrire.

 

Mais cessons de nous égarer pour en venir à ce qui nous occupe aujourd'hui, à savoir l'accord sur la sécurisation de l'emploi signé récemment entre les partenaires sociaux. Pour beaucoup ces négociations ont été un succès et constituent une avancée sociale historique pour le pays, tant sur le fond que sur la forme. Les signataires (Medef et CFDT notamment) ainsi que le gouvernement s'en sont d'ailleurs allégrement félicités.

 

Pour autant, il apparaît clairement que la portée de cet accord n'est pas si importante qu'on voudrait nous le faire croire. Là encore, qu'il s'agisse de son contenu même ou des conditions de sa signature. Dans l'absolu, l'idée d'associer les partenaires sociaux pour les questions de droit du travail est intéressante. Et cela traduit bien le côté social-démocrate de François Hollande. En revanche, je crois que l'Etat ne doit pas se désengager entièrement de ce processus comme ce fut le cas. En fervent défenseur de l'Etat interventionniste, je pense au contraire que c'est au gouvernement d'impulser les évolutions de législation, tout en y associant les syndicats.

 

Le cas précis de la conclusion de cet accord montre bien les limites de ce système. En effet, seules la CFDT, la CGC et la CFTC ont signé, FO et la CGT refusant de valider le document final. On peut alors s'interroger sur la légitimité de l'accord dès lors que deux des plus puissants syndicats du pays ne le valident pas. Sans parler du fait que certaines centrales (SUD, UNSA) n'étaient même pas associées au processus.

 

S'agissant du fond, c'est-à-dire des mesures adoptées, on remarque là encore que qualifier cet accord d'historique est loin d'être justifié. Il n'y a qu'à regarder dans le détail pour s'en rendre compte. Ce que nous allons bien évidemment faire.

 

Commençons tout d'abord par les efforts concédés par le patronat. En premier lieu, et c'est certes un progrès, on peut constater une hausse des cotisations chômage sur les contrats courts (+ 3 points pour les contrats inférieurs à un mois et + 0,5 à 1,5 points pour les contrats compris respectivement entre un et trois mois et supérieurs à trois mois). A priori, il s'agit là d'une bonne mesure. Pour autant, il faut reconnaître que ces hausses sont marginales et surtout il est important de relever que ce dispositif concerne uniquement les CDD et exclut donc de fait l'intérim. Bref, ce n'est qu'un leurre qui ne limitera en rien le recours aux contrats précaires.

Ensuite, l'accord instaure la mise en place de droits chômage rechargeables. Autrement dit, le salarié pourra conserver le reliquat de ses droits non utilisés en cas de reprises d'activité. Outre le fait que le salarié a cotisé pour obtenir ses droits, il apparait que les patrons concèdent ici un point qui ne les concerne que de manière lointaine dans la mesure où cela ne les impactera pas directement. De fait, ce sont bien les caisses chômage qui financeront cette mesure et non la trésorerie des entreprises.

Enfin, il faut malgré tout souligner la volonté de généraliser les complémentaires santé à des salariés qui en sont aujourd'hui exclus. Nuançons toutefois cela en rappelant que l'employeur ne financera que la moitié du coût, l'autre étant à la charge de l'assuré.

 

Et du côté salarié alors ? Et bien là les concessions sont nettement plus importantes et ne relèvent pas de la symbolique. Bien au contraire les conséquences seront visibles, et probablement à (très) court terme au vu de la situation économique de notre pays. Deux points ont ainsi particulièrement retenu mon attention.

Le premier concerne les "accords de maintien de l'emploi". Pour résumé, cela consiste à imposer demander aux salariés une baisse de salaire et/ou une augmentation du temps de travail pour une durée maximale de deux ans en cas de difficulté pour l'entreprise. En réalité il s'agit, ni plus ni moins, de légaliser le chantage à l'emploi mené actuellement par de nombreuses entreprises (Renault …). Gageons d'ailleurs que le recours à ce dispositif sera massif dans les prochains mois.

Dans la droite lignée du premier point, et satisfaisant ainsi la volonté de dérégulation du Medef, la seconde mesure accorde aux entreprises une plus grande souplesse dans les licenciements, notamment collectifs, par la réduction de certains délais légaux (durée de contestation d'un licenciement ...).

 

Au vu de ces éléments, et contrairement à ce que disent certains, il apparaît clairement que le Medef est le grand vainqueur de cette négociation. En effet, celui-ci a obtenu d'importantes concessions, demandées de longue date, de la part des syndicats et n'a cédé, de son côté, que de manière anecdotique. On peut donc se féliciter que FO et la CGT aient refusé de signer et, à l'inverse, que les autres organisations syndicales se soient une nouvelle fois couchées devant le patronat.

 

Sous couvert de compétitivité, mot à la mode du XXIème siècle, cet accord se révèle être finalement une nouvelle attaque contre le droit du travail qui conduit à davantage de flexibilité pour les entreprises, c'est-à-dire plus de précarité pour les salariés.

Cela montre une fois de plus qu'employeurs et salariés ne sont clairement pas sur un pied d'égalité. Ces dernières années les négociations ont très souvent, pour ne pas dire toujours, tourné à l'avantage du patronat, aidé en ce sens par les gouvernements successifs de droite et en particulier sous la présidence de Nicolas Sarkozy.

Si le dialogue est généralement préférable, il ne faut pas oublier que dans notre pays les plus grandes avancées sociales ont été obtenues par la lutte et le combat, pas par la discussion. Plutôt que les vaines tractations c'est donc un rapport de force qu'il faut engager aujourd'hui. La lutte des classes n'est clairement pas terminée et tend au contraire à revenir au premier plan. Bien naïfs sont ceux qui ne veulent pas le voir …

 

Partager cet article
Repost0

commentaires