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17 novembre 2010 3 17 /11 /novembre /2010 13:44

Décidément ! A chaque nouvelle intervention à la télévision du président, certains nous disent que Sarkozy a changé, qu'il s'agit d'un nouvel homme ...

Cela n'a donc pas manqué hier soir à l'occasion d'une interview de près d'1h30 donnée par Nicolas Sarkozy face à Claire Chazal (TF1), David Pujadas (FR2) et Michel Denisot (Canal +). Apparemment donc, un nouveau (nouveau, nouveau ...) Sarkozy est né et celui-ci tendrait à se "Chiraquiser". Enfin s'ils le disent ...

Mais revenons donc sur cette fameuse entrevue qui est la première depuis celle du 12 juillet dernier.

 

Pour commencer, attardons-nous brièvement sur la forme.

L'interview s'est déroulée à l'Elysée, dans la salle du conseil des ministres. Le cadre est donc assez chic et plutôt ancien avec un côté relativement solennel. A l'inverse, on peut remarquer que la table et les chaises étaient modernes avec un design agressif. On observe donc une certaine opposition dans ces éléments de décor qui ne me semble pas neutre. En effet, il est possible, à tort ou à raison, d'interpréter cela comme l'expression d'un message : Sarkozy est un président moderne, en phase avec son époque et l'actualité (table) mais il est également un président qui défend des valeurs traditionnelles, plus ou moins conservatrices et qui s'inscrit dans la lignée de ses prédécesseurs.

 

Outre le décor, il me semble intéressant de se pencher quelque peu sur l'attitude du président. Personnellement, je crois que l'on peut décomposer l'interview en trois temps. Le premier lorsqu'il est question du remaniement et des sujets d'actualité. Le second débute à l'instant où sont abordés les thèmes de la sécurité et de l'immigration. Le troisième correspond aux questions internationales et aux futures réformes.

Dans chacune de ces trois phases, Nicolas Sarkozy adopte un comportement différent. Au début, celui-ci est plutôt calme, avec une voix posée et peu de gestuelle. Puis les sujets de prédilection du président sont mis sur la table. Et là, dès les premières questions sur les Roms ou l'insécurité, le naturel reprend sa place. On assiste alors à un retour des tics et des gestes amples avec un accroissement du débit de parole. De plus, les propos deviennent  plus véhéments, plus incisifs (mise en cause des médias, répétition du mot "non" ...) avec davantage de questions à l'attention des journalistes qui, il faut le reconnaître, ont été embarrassés, gênés voire même désarçonnés. A ce moment là, Sarkozy illustre parfaitement l'adage "la meilleure défense c'est l'attaque".

Enfin, dans la dernière partie de l'émission, le président retrouve une certaine sérénité. Il s'agit bien évidemment de "faire président" et de faire preuve d'une certaine hauteur de vue. Et pour cela, quoi de mieux que les sujets internationaux, d'autant plus que la France a pris la présidence du G20.

 

Deux remarques pour en finir avec le style.

La première que l'on peut constater est que le président a souhaité faire passer le message qu'il défend la France et les Français. On a ainsi eu droit à maintes reprises à : intérêt général, intérêt du pays, au service de la France, intérêt national ...

La seconde est que, malgré tout, Nicolas Sarkozy a beaucoup parlé de lui en abusant du terme "je". D'ailleurs, ce dernier a tenté à de multiples reprises de se justifier (sur les retraites par exemple) ou de se dédouaner, se défendre (cas de son impopularité) en invoquant la situation dans d'autres pays (Allemagne, États-Unis ...). Néanmoins, pour être tout à fait honnête, il apparaît clairement que des efforts ont été faits. La preuve est que celui-ci a rendu hommage à de nombreuses personnalités politiques et à cherché à multiplier les "nous".

 

Mais la forme n'est pas tout et le fond revêt également une grande importance.

Beaucoup de choses ont été dites lors de cette entrevue. Aussi, je vais simplement revenir sur les éléments qui m'ont le plus marqué.

Tout d'abord, le président a annoncé le lancement prochain d'une grande consultation de 6 mois concernant la dépendance et l'instauration d'un cinquième risque. Le thème n'est pas nouveau et il était presque certain qu'il serait abordé dans la dernière partie du quinquennat. Il faut cependant noter que cela tranche fortement avec la réforme des retraites puisque l'on va assister à une longue concertation, donc à un certain dialogue social. Pourtant, il convient de nuancer cela dans la mesure où le sujet est relativement populaire et plutôt trans-partisan et représente alors, de ce fait, un risque moindre pour le pouvoir en place.

 

Ensuite, il a été question de la fiscalité avec la suppression programmée du bouclier fiscal et de l'ISF, en contrepartie d'une taxation des revenus et des plus values du patrimoine. Pour justifier cela, le président a mis en avant la volonté de convergence avec l'Allemagne, prétextant que cela permettrait de lutter contre les délocalisations.

Pourquoi pas ? Mais il faudrait informer Nicolas Sarkozy que nos entreprises ne délocalisent pas en Allemagne mais plutôt en Chine et dans les pays de l'Est. Pour autant, pourquoi se limiter à l'Allemagne ? Ne pourrait-on pas envisager d'aller plus loin avec une harmonisation au niveau européen ? Cela me semble envisageable, à condition de ne pas s'aligner sur le moins disant !

Personnellement, et bien que je ne fasse pas d'illusions, j'attends beaucoup de cette réforme de la fiscalité qui est un de mes sujets de prédilection.

 

Une autre réforme qui a été avancée est celle de la Justice avec l'introduction d'un jury populaire au côté du juge d'application des peines pour décider de la remise en liberté ou non d'un détenu ainsi qu'au sein des tribunaux correctionnels comme cela est déjà le cas aux assises.

Clairement cette proposition me semble démagogique et Nicolas Sarkozy surfe sur les évènements de ces derniers temps. D'ailleurs, l'idée avait déjà été mise en avant par Brice Hortefeux il y a quelques mois de cela. A titre personnel, je ne crois pas qu'une telle réforme aille dans le bon sens dans la mesure où je pense que les magistrats, au contraire des citoyens lambda, sont capables de faire abstraction de leur opinion. De plus, ces professionnels du droit bénéficient d'une formation non négligeable et d'une expérience qui me paraissent fort utiles.

 

Enfin, le président de la République a émis le souhait d'aller vers un allègement de la législation en matière d'urbanisme et de logement. Cela me semble être une bonne chose mais je crois qu'il est nécessaire d'aller vers une généralisation de ce processus avec un réel coup de balai à passer afin de supprimer toutes les lois désuètes ou obsolètes.

 

Au final, que retenir de cette intervention ?

Première chose, cela faisait longtemps que des journalistes n'avaient pas aussi bien fait leur travail face à Nicolas Sarkozy. En effet, leurs questions étaient incisives et ils ont abordé certains sujets "sensibles "  tels que les Roms, les écoutes téléphoniques ou encore le prix Nobel de la paix. Malheureusement, leur prestation a été quelque peu entachée par leur manque de réaction sur les sujets relatifs à la sécurité et surtout par une certaine cacophonie liée à la présence d'un trio inédit.

Deuxième chose, Nicolas Sarkozy a une fois de plus prouvé qu'il était un excellent communiquant, mais cela n'est évidemment pas une nouveauté.

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