Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
11 février 2013 1 11 /02 /février /2013 18:02

Les lecteurs assidus de ce blog auront pu constater que l'art et la culture ne sont pas mes thèmes de prédilection. Non pas que je n'y sois pas sensible mais je leur préfère grandement la politique et l'économie. Cela étant, c'est de ma récente sortie au cinéma dont il sera question aujourd'hui.

 

Un certain nombre de mes amis m'avaient fortement recommandé d'aller voir Django Unchained de Quentin Tarantino. Et les excellentes critiques de ce film m'encourageaient effectivement en ce sens. Malgré tout, j'avais quelques réserves concernant le réalisateur depuis que j'avais vu Inglorious Basterds avec Brad Pitt. En effet, je n'avais que peu apprécié l'enchainement plutôt décousu du film ainsi que cette articulation en chapitre assez frustrante pour moi. Mais finalement les quelques extraits visionnés ont fini par me convaincre d'y aller.

 

Et bien m'en a pris tant ce film est excellent. Mieux il s'agit là du meilleur film que j'ai vu depuis longtemps : 2h45 de pur bonheur sans longueurs ni ennui. En termes de pitch basique, on retrouve bien là le grand classique américain à savoir un héros qui va sauver une demoiselle en détresse avec l'aide de son fidèle compagnon. Traditionnel certes mais toujours aussi efficace. De même, et c'est également une marque du cinéma américain, l'opposition entre le bien et le mal, les gentils et les méchants est clairement posée tout au long du film.

 

Outre ces aspects, il est clair que cette production est mise en valeur par la qualité de ces acteurs avec un casting haut en couleurs, si je puis dire. Les personnages principaux, à savoir King Schultz (Christoph Waltz) Django (Jamie Foxx) et Calvin Candie (Léonardo Di Caprio) sont tout simplement géniaux, à la fois dans leurs caractéristiques propres et leur interprétation. Sans oublier bien sûr le fidèle Steven campé par le célèbre Samuel L. Jackson.

 

Par ailleurs, il faut noter l'importance accordée à la musique par Tarantino. Musique qui rappelle indéniablement les westerns dont le réalisateur a voulu s'inspirer. Et prépondérance également de l'humour distillé par petites touches tout au long de l'intrigue qui permet de prendre du recul et de dédramatiser et de tourner à la dérision certains personnages et situations. Je pense notamment à la scène des cagoules lors de l'attaque des hommes du Ku Klux Klan.

 

Pour en finir avec l'aspect artistique, je soulignerais la violence du film. Il s'agit certes d'une marque de fabrique de Tarantino (cf Inglorious Basterds ou Kill Bill par exemple) mais certaines scènes peuvent malgré tout être assez choquantes, en particulier du fait de leur réalisme. Personnellement, ce n'est pas tant la violence physique qui m'a mis mal à l'aise par moment mais plutôt la "violence "psychologique et verbale" qui existe entre les différents protagonistes et en particulier entre les blancs et les noirs.

 

Mais si Django Unchained est plus qu'un bon film c'est, je crois, notamment en raison du thème qu'il aborde et du contexte particulier dans lequel les personnages évoluent. En effet, l'histoire de déroule en 1858 aux Etats-Unis quelques années seulement avant la guerre de Sécession. C'est donc dans une période noire des Etats-Unis, durant les années d'esclavage que se situe l'intrigue. Du fait de cet environnement, le film oblige donc d'une certaine manière à réfléchir sur l'esclavage et l'égalité entre les Hommes.

 

Le parti pris de Tarantino est on ne peut plus explicite du début à la fin. De fait, la plupart des personnages blancs sont assez primaires avec une intelligence clairement limitée et sont souvent tournés en dérision. De plus, le personnage du docteur Schultz, lui aussi blanc, incarne une sorte de conscience qui cherche à tempérer les ardeurs des esclavagistes.

Cela étant, Quentin Tarantino entend rappeler la terrible réalité de l’esclavage : châtiments corporels, travail dans les champs … Si celui-ci était très répandu à l'époque et a permis un enrichissement de nombreuses nations, il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'une pratique d'asservissement et de soumission d'un être humain sur la seule base de sa couleur de peau.

 

Si l'action se déroulait à la fin du XIXème siècle, je crois malgré tout que des parallèles peuvent être faits avec des périodes plus proches de nous, et en particulier la seconde guerre mondiale. Je prendrais notamment deux exemples pour illustrer cela.

En premier lieu, et la scène du repas dans la maison de Calvin Candie l'éclaire à merveille, Calvin Candie (Léonardo Di Caprio) explique à ses hôtes la supériorité de l'Homme blanc en se justifiant avec des données scientifiques et notamment la constitution du cerveau. En somme, les blancs exploitaient les noirs car il s'agissait d'êtres inférieurs avec une intelligence moins développée et une soumission plus forte. C'est ainsi avec ce genre de propos qu'Hitler et l'Allemagne Nazie ont réussi à exterminer des millions de juifs dans les années 1940.

Ensuite, et c'est peut-être plus discutable, je pense que le "comportement zélé" de certains esclaves peut être rapproché de celui des collabos sous l'occupation. Ainsi, Steven (Samuel L. Jackson) le majordome était d'une grande fidélité envers son maître et n'a pas hésité à dénoncer sa camarade d'infortune dans l'unique but de plaire à son propriétaire. Comme une partie des Français à l'époque, cet homme est allé au-delà des attentes de son maître au risque de trahir les siens.  Si cela est difficilement compréhensible sur le plan moral, on peut toutefois penser que ces comportements s'expliquent par une volonté (légitime) d'améliorer leur sort en s'attirant les faveurs du tyran.

 

Mais au-delà de la seconde guerre mondiale, des ressemblances existent avec l'ensemble des conflits où un peuple est opprimé par un autre. Dans l'Histoire du monde, les situations de domination ont été multiples et existent encore aujourd'hui. Quelles que soient les régions et les époques, les despotes ont toujours une bonne raison de faire régner la peur et la violence. Et ce jusqu'à ce qu'un soulèvement populaire massif permette d'inverser la tendance.

Aujourd'hui, dans notre monde moderne et "civilisé", l'esclavage existe malheureusement toujours. Celui-ci ne se présente plus sous la même forme de manière aussi ouverte mais les situations d'asservissement d'un individu par un autre sont encore légions, que ce soit en France ou à l'étranger. Et comme à l'époque l'objectif reste le même : exploiter la misère humaine pour s'enrichir toujours plus.

 

Plus que l'esclavage en tant que tel, le film de Tarantino conduit à s'interroger sur le respect de chacun et l'égalité entre les Hommes. Dans cette histoire, les noirs sont maltraités et dévalorisés en raison de leur seule couleur de peau. Par chance, les choses ont évolué dans le bon sens depuis mais il existe encore trop de comportements intolérables dans notre société. Alors bien sûr l'égalité parfaite n'existe pas et chaque personne est (heureusement) différente. Pour autant, les Hommes, quelles que soient leur couleur, leur origine ou leur ethnie, se ressemblent malgré justement leurs disparités. Et plutôt que d'exacerber ce qui nous éloigne, il serait préférable pour le bien de tous de chercher à valoriser ce qui nous rapproche. Et c'est là l'essence même de la Nation que de rassembler des gens différents autour de valeurs communes et dans un dessein collectif.

 

Juger l'autre fait partie intégrante de la nature humaine et chacun y est confronté au quotidien. Mais il faut, je crois, savoir dépasser ces a priori pour voir plus loin que le seul aspect physique.

 

En 2007, durant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy avait pour slogan : "ensemble tout devient possible". C'est bien évidemment lui qui avait raison et cette phrase est indéniablement toujours d'actualité. Or en ces temps difficiles où la crise fait rage, il est bien plus facile de se replier sur soi-même et de rester avec ses semblables dans une forme confortable de communautarisme. Malgré tout, cela ne conduira en rien à résoudre les problèmes mais au contraire à les accentuer.

Si l'union fait la force, certains ont bien compris que diviser permet de mieux régner. Et ils n'hésitent donc pas à mettre de l'huile sur le feu, quitte à embraser le pays, en jouant sur les peurs et les angoisses. Rentrer dans leur jeu serait la pire des choses et conduirait irrémédiablement à une remise en cause de la cohésion nationale.

 

"L'Homme est un loup pour l'Homme" disait Thomas Hobbes. Cela était vrai au temps de la citation mais cela l'est encore plus aujourd'hui que l'argent, la finance et l'économie sont devenus l'alpha et l'oméga de nos civilisations. C'est généralement dans l'adversité que naissent les plus belles idées. Or c'est dans un tel moment que nous nous trouvons actuellement. Tâchons donc de rester unis en nous serrant les coudes les uns les autres afin de sortir de la tempête plutôt que de nous tirer dans les pattes pour de futiles raisons.

Partager cet article
Repost0

commentaires